Communiqué de presse

L’Assemblée Nationale mène en ce moment une mission-flash sur les entreprises « DU SECTEUR DU TRANSPORT MARITIME QUI ONT DÉGAGÉ DES PROFITS EXCEPTIONNELS DURANT LA CRISE ».

Bien que le rôle d’une section syndicale ne soit pas de prendre position publiquement sur une réflexion politique, les débats sur la création d’une taxe des superprofits et sa potentielle application au Groupe CMA-CGM nous obligent à partager notre vision de la situation et rétablir certaines vérités, dans l’intérêt des collaborateurs.

 

Le personnel sédentaire de la CMA-CGM représente environ 85% des collaborateurs français (les 15% restants étant les navigants), répartis dans les différents établissements du Groupe, y compris en territoires domiens. Le SNPSCN (syndicat auquel est rattaché notre section syndicale) est représentatif dans le maritime, le fluvial, les ports et la logistique portuaire. Cela nous permet d’avoir une vision précise au sein de la CMA-CGM et globale au niveau de la situation française.

 

Nous sommes sensibles à la crise du pouvoir d’achat et plaidons, comme notre Confédération, pour un meilleur partage de la valeur créée dans l’entreprise. Il est donc nécessaire, en cas de profits, que les salariés soient les premiers bénéficiaires. Et si l’équation du partage de la valeur est compréhensible à l’échelle nationale, il faut tenir compte des particularités de chaque entreprise et ne pas mettre en péril une entreprise qui œuvre déjà pour l’économie française.

 

Il faut distinguer les entreprises en fonction de leurs métiers, comme le font d’autres pays européens, plutôt que de les assimiler en fonction de leurs bénéfices. Le Groupe CMA-CGM n’est pas une entreprise pétrolière ou gazière réalisant des profits records grâce à la crise énergétique en lien avec la guerre en Ukraine. C’est un groupe de transport multimodal dont les profits actuels sont liés à l’offre et à la demande, ainsi qu’à l’intégration d’autres entreprises au sein du Groupe.

La crise Covid a encouragé les ménages à consommer différemment avec un report des dépenses de loisirs vers des biens de consommations en provenance de l’étranger, et a contraint certains ports à la fermeture. Ces deux effets ont provoqué une hausse de la demande, à laquelle les armateurs maritimes ont tenté de s’adapter en affrétant les navires disponibles. L’offre n’a cependant pu rattraper la demande. Les prix ont augmenté, fortement.

 

Avant Covid, les taux de frets étaient particulièrement bas, permettant tout juste aux compagnies maritimes de rentrer dans leurs frais. Après un premier semestre 2022 dans la continuité de 2021, le marché s’est tendu, la demande s’est ralentie et les taux ont fortement baissés, même s’ils restent plus haut qu’avant la crise du Covid. Cet épisode est caractéristique du marché du transport maritime, cyclique, connaissant des hauts et des bas.

 

A l’ère de la globalisation et du commerce mondial, la réflexion ne peut pas être menée à l’échelle d’un pays mais à minima à celle d’une communauté économique géographique.

4 des 5 premiers armateurs mondiaux sont européens : l’italo-suisse MSC (1er), le danois Maersk (2ème), le français CMA-CGM (3ème) et l’allemand Hapag-Lloyd (5ème). La décision unilatérale d’un pays de taxer les revenus d’un armateur pourrait créer une situation d’affaiblissement de cet armateur par rapport à ses concurrents européens. Est-ce le résultat escompté ?

 

L’imposition de la branche maritime de la CMA-CGM s’effectue à travers la taxe au tonnage. Les revenus étant variables, il a été décidé, il y a déjà bien longtemps, de taxer une valeur mesurable : le tonnage des bateaux. Ce système, créé en Grèce en 1957, est toujours en vigueur dans de nombreux pays, dont la France. Le nombre de bateaux étant croissant au sein de Groupe, l’imposition est donc croissante. Mêmes les années ou les résultats furent négatifs, le Groupe a toujours payé la taxe au tonnage. Ce système, sans doute perfectible, a néanmoins toujours permis aux entreprises maritimes qui y sont assujettis et à l’Etat de s’y retrouver.

 

Il faut mesurer l’impact à court et long terme d’une nouvelle taxe sur les revenus de la CMA-CGM. Faut-il augmenter la taxation de cette entreprise ou lui permettre de réinvestir massivement pour faire face au défi mondial de la transition énergétique dans le domaine maritime ? Ainsi, dès 2023, l’Organisation Maritime Internationale impose de nouvelles normes sur la consommation en fuel des navires. Et la CMA-CGM s’est fixé l’objectif de la neutralité carbone en 2050.

Cela nécessite de nombreux investissements en recherche et développement, en modification des navires ou achat de nouveaux navires plus propres. Les compagnies maritimes ont besoin d’argent pour investir et construire de nouveaux bateaux.

 

Contrairement aux entreprises du CAC40 qui ont redistribué 64% de leurs bénéfices aux actionnaires (chiffres 2021 hors rachat d’actions – La Tribune), le Groupe CMA-CGM a réinvesti la majorité de ses bénéfices, et particulièrement en France, avec les rachats de Colis Privé et Gefco, les partenariats avec Brittany Ferries et Air France. Outre la consolidation et le développement des activités du Groupe, cela a directement contribué au maintien de l’emploi en France. Fallait-il préférer une prise de participation étrangère au sein de ces entreprises ? Ou pire encore, risquer leurs fermetures ?

 

A défaut d’une réflexion européenne sur le sujet, et plutôt qu’une taxation unilatérale de l’Etat Français, nous souhaitons que le Groupe CMA-CGM puisse continuer à redistribuer à ses collaborateurs et à investir massivement :

  • Dans la transition écologique du modèle maritime et dans les infrastructures terrestres françaises (maritimes, fluviales, portuaires et logistiques), afin de maintenir et créer de l’emploi en France ;
  • Dans l’attractivité de l’entreprise, à travers les différents accords syndicaux et sociaux.